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Ville d’Orléans

CENTRE CHARLES PÉGUY

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Colloque international

La réception de Charles Péguy en France et à l’étranger

Dagli Atti del Convegno Internazionale di Studi che si è tenuto  in Francia a Orléans

Carlo Bo et Charles Péguy

di Antonio Stanca
(Università di Lecce)

Dans cette recherche, on essayera de spécifier le rapport existant entre Péguy et l’un des plus importants représentants de la culture moderne et contemporaine italienne: le critique Carlo Bo. De 1935 à nos jours, ce dernier a produit une série d’essais visant à éveiller à nouveau l’intérêt pour Péguy dans les milieux culturels et à favoriser une réception de son message par une nouvelle méthode de lecture et de comprèhension. Bo n’a pas publié une étude organique de la production péguyenne; il a procédé au contraire en communion avec l’ouvre par des essais qui soulignaient la particularité du “cas Péguy”, et qui invitaient à le découvrir . Le critique n’a jamais perdu de vue Péguy et même s’il a traité d’autres personnages et d’autres situations appartenant à la culture française, il s’est montré tout particuliérement proche de Péguy, en étant animé par le même humanisme et la même morale.

En effet, c’est à lui qu’on doit l’essai - Per il vero Péguy [i] – paru en 1935, et qui faisait suite à un long silence sur cet auteur.

Dans cet ouvrage, Bo exprime sa propre amertume en constatant que beaucoup de circostances ont empêche et empechent encore de pénétrer l’intimité de l’oeuvre de Péguy et d’en découvrir l’exacte signification. Il regrette la façon dont on a traité l’écrivain : on ne lui a attribué que des étiquettes, comme l’homme des Cahiers, le politique, le catholique, le héros, ce qui aux yeux du publique a cristallisé sa figure dans des formes schématiques qui ont détourné l’attention de l’ardeur intime de son âme. «Malgré les nombreux rappels, le vrai message de Péguy est resté ignoré jusqu’à nos jours et n’a généralement pas été acuueilli ». [ii]

Pour Bo, il faut s’attacher avant tout chez Péguy, à la découverte d’une âme : la révéler par d’autres méthodes de lecture devrait être notre devoir principal. L’appel n’obtint pas l’effet espéré. En 1946, ce fut encore Bo qui, dans un nouvel essai – Il segreto di Péguy - , se référant à la biographie de Péguy publié en France par Romain Rolland en 1945, proposa encore une façon tout à fait nouvelle de voir Péguy.

Selon le critique, il fallait l’examiner sur deux plans : celui de la vie et celui de la pensée. Ces deux plans ne devraient pas, selon lui, être séparés, ni confondus, mais ils devraient aider à « fixer son adhésion naturelle à la réalité quotidienne  [iii] ». C’est donc sa « personnalité intérieure » qui jusqu’à maintenant n’a pas été découverte et pour y arriver in serait utile, selon Bo, de réexaminer sa poésie. Ce n’est qu’alors que nous pourrions connaître « cette clé unique qui nous révélera pour toujours le segret de son discours » :

 

   « A cóté du Péguy catholique, du Péguy hérétique, du Péguy libre penseur ou même national-socialiste, il y a le vrai Péguy, le poète caché dans l’homme que généralement tout le monde connaît sous les traits d’une légende ». [iv]

 

Plus tard, en 1964, pour le cinquantième anniversaire de la morte de Péguy, Bo publia dans le Corriere della Sera un article dont le title était : « Péguy senza leggenda  [v] », où il exprimait de nouveau son désaccord sur la légende qui s’était créée autour de l’écrivain et qui en avait empêché une exacte connaissance. Pendant ces années, ont paru quelques travaux suggestifs. [vi]

Sur le plan de l’interprétation de Péguy, globalement compris comme guide moral et spirituel, C. Bo poursuivra naturellement ses efforts. A l’occasion du centenaire de la naissance de Péguy, il le soulignera en donnant dans le Corriere della Sera une autre contribution dont le titre est « Charles Péguy e il popolo nuovo ». [vii] Dans cet article, il dira qu’il faut se libèrer de tout intellectualisme si l’on veut comprendre dans son essence profonde le message de Péguy. « Discuter comment et pourquoi il a  été socialiste ou bien catholique, cela n’a pas de sens… La véritable tentative de Péguy est un acte d’amour trop haut et trop complexe pour une analyse trop intellectualiste » [viii] . C. Bo parle encore chez ce dernier, de son rôle de prophète solitaire et inécouté et de « son profond besoin d’amour, en tant qu’interpréter des besoins des hommes, au nome de la foi et de la charité. Il affirme qu’en lui le poète et le prophète sont une seule et même chose : leur but est de libérer et transformer le monde. Si son message reste encore inécouté, il pense qu’un jour il y aura un peuple nouveau qui saura découvrir et lire Péguy. [ix]

On retrouve d’autres interventions de C. Bo à propos de Péguy dans un essai publié dans la revue L’Europeo en 1977 dont le titre était : « Que disait Péguy il a 70 ans ?  [x] . Dans cet article, C. Bo attirait l’attention sur la nécessité d’une interprétation juste de Péguy en Italie, but qu’on n’avait pas encore atteint malgré l’intérêt d’homme de culture tels que Croce, Papini, Prezzolini, Soffici, etc., et malgré le colloque international « Péguy vivant » (Lecce, 1977). Lors de ce colloque, C. Bo avait d’ailleurs présenté un rapport introductif, « Come abbiamo letto Pèguy » [xi] , déjà paru dans Attualità di Péguy [xii] et dans Prospettive nel mondo. [xiii]

Dans son rapport, C. Bo s’occupe en particulier du « comportement incertain » de la critique italienne dans les premières années du vingtième siècle. On retrouve des traces de Péguy dans la pensée et les œuvres de D’Annunzio, Cecchi, Boine, Jahier, Bacchelli plutôt que chez les hommes de culture en générale. Par la suite, il faut dire que ces auteurs eux- mêmes oublieront Péguy, surtout après la Grande Guerre. D’autres événements – la seconde guerre mondiale, le pontificat de Jean XXIII et le renouveau catholique des années 60- n’ont pas servi à sortir Péguy de l’anonymat, d’autant plus qu’on avait désormais tendance à lui substituer Sartre, Proust, Gide, lesquels « pauvres, très pauvres au point de vue de l’esprit », avaient un « charme intellectuel » majeur. [xiv]

C. Bo souligne en autre qu’en France la fortune de Péguy n’a pas été très différence à cause « non pas de la vision du passé de sa patrie, mais plutôt de ce qu’il indiquait comme étant son futur » [xv] . Péguy, selon C. Bo, n’a pas été compris en Italie car

 

« Nous l’avons mal lu. Nous l’avons adapté a nos habitudes,   

           nous l’avons réduit et faussé, nous l’avons trahi. Il n’était pas venu pour cela, il ne s’était pas perdu dans les labyrinthes des évocations poétiques pour solliciter une "révolution morale" qui n’a pas eu lieu. Notre temps a été un temps de révolutions,  mais tout a été fait en se passant du matériel moral qui est à la base de la grande parole de Péguy ».

 

Sous cet aspect, il peut être considéré comme en prophète. [xvi] Un prophète qui avait prévu la ruine de la société liée au « culte de l’argent » et à la matérialisation de la vie ; qui avait prévu l’exclusion des pauvres, des malades, des faibles, des humbles et qui, comme eux, est resté inécouté, exclu, trahi, incompris.

 

           « Nous ne l’avons pas compris, il est vrai, mais après tant d’années il reste notre prophète, un des derniers, venu parmi nous non pas pour nous annoncer la vérité, mais pour nous dire qu’il y a des moyens simples pour la servir, pour la réaliser, pour la rendre manifeste […]. A ceux qui viendront après nous, à la grande famille sans visage des jeunes gens, nous disons clairement que nous n’avons pas été capables de le comprendre vraiment et que, pourtant, la vérité et la sainteté de la vie sont de son côté ». [xvii]

 

Comme on peut le voir, Bo a toujours suivi la destinée de Péguy ; il a toujours contesté les études trop sectorielles et trop classificatoires sur lui. Selon Bo, il faudrait relire son oeuvre car Péguy n’a pas été un phénomène seulement littéraire ou philosophique ou religieux ou politique, mais surtout un phénomène humain. Il n’a pas travaillé suivant le modes de son temps, mais plutôt en opposition à celle-ci, car son âme ressentait son temps comme faux et injuste ; il n’a pas seulement parlé de saits, mais il a été lui-même un saint, qui a écrit et véçu en saint.

C. Bo exprime ainsi sans doute son affinité avec Péguy, affinité qui avait changé un intérêt culturelle en une nécessité de l’âme, un sens de la moralité qui est très proche de l’austérité de Péguy. Mais d’autres analogies sont naturellements observables. Pour Péguy, la philosophie n’est pas une doctrine rigide, mais une façon de vivre dont le but et d’améliorer le condition générales de la vie. Pour Bo, la littèrature doit se situer hors de tout conditionnement historiqhe, social et culturel : elle est une activitè intérieure, une haute valeur de formation.

A la « révolution morale » de Péguy correspond donc ce « climat intérieur » de Bo; et pour les deux, on peut sans doute parler d’une finalité religieuse de la vie : un humanisme qui a marché à contrecourant et à ses propres frais.

Une différence est toutefois évident : Péguy pense et agit de façon concrète ; Bo cherche à résoudre toutes les questions, même l’actions, par la pensée et l’écriture. Ce qui nous intéresse le plus, ce sont les éléments communs aux deux personnalités et sourtout l’hypothèse que ces éléments, chez Bo, ont été promus par la connaissance de Péguy.

 
Notes

C. Bo, Per il vero Péguy, essai paru avec le titre Note sur Péguy, in Saggi di letteratura francese, Brescia, Morcelliana, 1935, ensuite avec le titre Per il vero Péguy, in Saggi per una letteratura francese, Brescia, Morcelliana, 1946, p. 265 -270 

[ii] Ibid, p. 268.

[iii] C. Bo “Il segreto di Péguy”, Avanti!, 7juillet 1946, p. 3, in Della letteratura e altri saggi, Florence, Vallecchi, 1953, p. 349-356.

[iv] C. Bo “Il segreto di Péguy , op. cit. p.350.

[v] C. Bo, “Pèguy senza leggenda”, Il corriere della sera, 21 octobre 1964, p.3

[vi] Cf. C. Scarpati, L’antiteatro  di Péguy, Brescia ed. Francescanum, 1970, p.212; R. Gasparro, “Charles Péguy e la soituazione mitografica di Jeanne D’Arc”, Atti dell’accademia Peloritana, 1971-1972, p. 349-389; J.Rodano, Il pensiero politico di Charles Péguy”, Quaderno della rivista trimestrale, Mai 1972, p.121-153.

[vii] C. Bo “Charles Péguy e il popolo nuovo” Corriere della Sera, 11 Mars 1973, p.3 Texte recueilli in C. Bo , Aspettando il vento, Ancone, L’Astrogallo, 1976.

[viii] Ibid.

[ix] Ibid.

[x] C. Bo, “Cosa diceva Péguy settant’anni fa?”, L’Europeo, Milan, 1977.

[xi] C. Bo, “Come abbiamo letto Péguy”, Atti del Convegno Internazionale Péguy vivant, Lecce, Milella, 1977, p. 23-28.

[xii] Bo, Secrétain, Viard, “Annualità di Péguy”, Il libro Europeo, A. I, n° 1, 1977, p. 13-25.

[xiii] C. Bo, “Come abbiamo letto Péguy”, Prospettive nel mondo, A. II, n° 11-12, 1977.

[xiv] Cf. C. Bo, “Come abbiamo letto Péguy”, op. cit.

[xv] Ibid, p.23.

[xvi] Ibid, p. 26.

[xvii] Ibid, p.28.


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